Telemann, Georg Philipp (1681-1767)
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Biographie
Enfance et jeunesse
Telemann est issu d'une famille cultivée de Magdebourg ; presque tous ses ancêtres ont fréquenté l'université. Son père Heinrich ainsi que le père de sa mère Maria ont exercé une fonction ecclésiastique. En dehors de son arrière-grand-père paternel, qui avait été un temps chef de chœur à l'église, aucun autre membre de sa famille n'entretenait un rapport direct à la musique. Georg Philipp est le dernier des trois enfants qui ont atteint l'âge adulte.
Georg Philipp fréquente le collège de la vieille ville et l'école de la cathédrale de Magdebourg, où il reçoit une instruction en latin, rhétorique, dialectique et poésie allemande. Témoignent par exemple de sa vaste culture générale les vers allemands, français et latins qu'il écrivit et publia dans son autobiographie ultérieure. En outre, Telemann maîtrise l'italien et l'anglais jusqu'à un âge avancé.
À l'époque de Telemann, les concerts publics étaient encore inconnus à Magdebourg, c'est la musique laïque exécutée à l'école qui complétait la musique religieuse. En particulier l'école de la vieille ville où était régulièrement exécutée de la musique avait une grande importance pour l'éducation musicale de la ville. C'est aussi dans les écoles privées plus petites qu'il fréquenta que Telemann apprit, seul, à jouer de divers instruments comme le violon, la flûte, la cithare et le clavecin.
Telemann fait rapidement preuve d'un grand talent musical et commence à composer ses premiers morceaux dès l'âge de dix ans, souvent en secret et sur des instruments prêtés. Il doit ses premières expériences musicales fondées à son Kantor Benedikt Christiani. Après seulement quelques semaines d'enseignement du chant, il est en mesure de remplacer son maître dans les classes supérieures.
À part un enseignement de clavecin qui dure deux semaines, Telemann n'a jamais pris de cours de musique. Ses parents veulent plutôt modérer son zèle. En particulier sa mère qui, devenue veuve en 1685, désapprouve son engouement pour la musique, considérant le statut social du musicien comme inférieur.
C'est à douze ans que Telemann compose son premier opéra, Sigismundus, sur un livret de Christian Heinrich Postel. Pour détourner Georg Philipp d'une carrière musicale, sa mère confisque alors tous ses instruments et l’envoie, fin 1693 ou début 1694, à l'école à Zellerfeld. Elle ignore alors probablement que le surintendant y est Caspar Calvör, passionné par l'écriture de la musique et qui exigera beaucoup de Telemann. Presque chaque semaine, Telemann compose des motets pour le chœur de l'église, ainsi que des arias, de la musique de circonstance qu'il présente aux Stadtpfeifer (musiciens municipaux).
En 1697, Telemann est élève du Gymnasium Andreanum à Hildesheim. Sous la conduite du chef Johann Christoph Losius, il parfait son instruction musicale et apprend, là aussi en grande partie en autodidacte, à jouer de la flûte à bec, de l'orgue, du violon baroque, de la viole de gambe, de la flûte traversière, du hautbois, du chalumeau, de la contrebasse et du trombone. Parallèlement, il compose des œuvres vocales pour le théâtre de l'école et aussi pour un livre d'école publié en 1708 ("Géographie chantante", dont la paternité est toutefois discutée). D'autres commandes de compositions pour le service de l'abbaye Sankt-Godehardi lui furent passées par le directeur musical jésuite de la ville, Pater Crispus.
Telemann est aussi influencé par la vie musicale des cours de Hanovre et de la principauté de Brunswick-Wolfenbüttel (Brunswick), où il a l'occasion d'entendre de la musique instrumentale française et italienne. Les expériences accumulées à cette époque marqueront une grande partie de son travail ultérieur. En outre, il fait la connaissance des styles plutôt italiens de Rosenmüller, de Corelli, de Caldara et de Steffani.
Les années d'études à Leipzig
En 1701, Telemann s'inscrit à l'Université de Leipzig pour étudier le Droit et, sous la pression de sa mère, s'engage à ne plus s'occuper de musique. C'est du moins ce qu'il a affirmé dans son autobiographie ; cependant, le choix de la ville de Leipzig, qui est alors la capitale de la musique moderne, ne semble pas être un hasard. En chemin pour Leipzig, Telemann fait halte à Halle pour y rencontrer Georg Friedrich Händel, alors âgé de seize ans. Une amitié nait qui durera toute la vie. Telemann a écrit qu'il a d'abord caché ses ambitions musicales à ses condisciples. Son camarade de chambre trouve cependant par hasard une composition dans son bagage à main et la fait exécuter le dimanche suivant à l'église Saint-Thomas de Leipzig. Le maire de Leipzig commande alors à Telemann la composition de deux cantates par mois pour le service religieux.
Dans l'année qui suit son entrée à l'Université, Telemann forma un orchestre composé de 40 étudiants mélomanes (le Collegium Musicum), qui donne aussi des concerts publics. Contrairement à d'autres orchestres amateurs, le Collegium survivra, sous le même nom, après le départ de Telemann. Plus tard encore, sous la direction de Johann Sebastian Bach, le "Collegium Musicum" télemanien aura une grande influence sur la vie musicale de la ville.
Telemann semble avoir continué ses études universitaires mais surtout, dans la même année, est nommé directeur de l'Opéra de Leipzig aux représentations duquel participent également beaucoup de membres du Collegium et dont il restera le compositeur principal jusqu'à sa fermeture.Au cours des représentations, il réalise la basse continue et chante aussi occasionnellement. De plus en plus irrité par l'aura croissante de Telemann, le directeur musical municipal officiel Johann Kuhnau lui reproche d'avoir pris avec ses œuvres profanes une trop grande influence sur la musique sacrée et lui refuse, pour les concerts de l'opéra, la collaboration du chœur qu'il dirige. En 1704, Telemann est engagé comme directeur musical à la Neukirche (église neuve) de Leipzig, qui est alors l'église universitaire de la ville. Il se décharge toutefois de la place de titulaire de l'orgue afférente à ce poste sur des étudiants. Telemann ne dispose alors probablement pas d'une chorale et écrit exclusivement des cantates pour solistes.
Telemann entreprend deux voyages à Berlin. En 1704, il reçoit du comte Erdmann II von Promnitz la proposition de succéder à Wolfgang Caspar Printz comme Kapellmeister à la cour de Sorau en Silésie. La raison pour laquelle l'attention du comte s'est portée sur lui reste inconnue. Après cela, la ville, qui apprécie son style nouveau de composition, offre à Telemann le poste de Kantor à Saint-Thomas pour succéder à Kuhnau. Les tensions nées entre Kuhnau et Telemann l'ont peut-être incité à quitter Leipzig prématurément.
Sorau et Eisenach
En juin 1705, Telemann commence son travail à Sorau. Le comte est un grand admirateur de la musique française et voit en Telemann un héritier talentueux de l'école de musique de Versailles de Lully et Campra, dont il avait ramené quelques partitions d'un voyage en France, et que Telemann se met à étudier. A Sorau, Telemann rencontre Erdmann Neumeister, dont il mettra plus tard les textes en musique et qu'il reverra à Hambourg. Lors de voyages à Cracovie et Pszczyna il apprend à apprécier le folklore polonais et morave, qu'il découvre aussi bien dans les auberges que dans des manifestations publiques. En 1706, Telemann quitte Sorau, menacée par l'invasion de l'armée suédoise et se rend à Eisenach, probablement avec une recommandation aux familles de princes saxons apparentés aux comtes Promnitz. Là, il est nommé en décembre Premier violon et Kantor à la cour du duc Johann Wilhelm et fonde un orchestre.
Il fait souvent de la musique avec Pantaléon Hebenstreit. En outre, il rencontre le théoricien et organiste Wolfgang Caspar Printz ainsi que Johann Bernhard Fischer von Erlach et Jean-Sébastien Bach. Il compose à Eisenach plusieurs concerts pour différentes formations, entre 60 et 70 cantates et autant de sérénades, de la musique religieuse, des opérettes à l'occasion de fêtes. Il en rédige par ailleurs le texte en grande partie seul. À cela s'ajoutent quatre ou cinq années passées à fournir des cantates à caractère religieux. Il participe lui-même à la représentation de ses œuvres en tant que baryton.
En octobre 1709 Telemann épouse Amalie Luise Juliane Eberlin, une courtisane de la Comtesse de Promnitz. Quelque temps auparavant, il est nommé secrétaire d'un Duc - une fonction importante à l'époque. La femme de Telemann meurt seulement deux ans après leur mariage, en janvier 1711, de fièvre puerpérale après la naissance de leur fille.
Francfort
Peut-être parce qu'il était à la recherche de nouveaux défis à relever, peut-être pour ne pas avoir à dépendre de l'aristocratie, Telemann postule à Francfort-sur-le-Main. On l'y nomma en février 1712 directeur de musique de la ville. Il achève sa cantate profane commencée à Eisenach et en compose cinq autres. En outre il est chargé des cours de quelques élèves d'écoles privées. Tout comme à Leipzig, il ne se contente pas de ces quelques activités. En 1713, il entreprend d'organiser des concerts hebdomadaires ainsi que différentes tâches administratives du très distingué club "Gesellschaft Frauenstein". De plus, la cour d'Eisenach le désigne chef d'orchestre officiel, pour qu'il puisse conserver ce titre, mais surtout pour qu'il continue à livrer des cantates et autres musiques profanes et sacrées. Cette situation dure jusqu'en 1731.
Durant son séjour à Francfort, outre ses cantates, Telemann compose des oratorios, des morceaux pour orchestre et musique de chambre dont une grande partie fut publiée, ainsi que des œuvres pour fêtes politiques et des sérénades pour mariage. Toutefois il ne trouve aucune occasion de rendre publics ses opéras, qu'il continue pourtant à écrire pour l'Opéra de Leipzig.
En 1714 il épouse Maria Katharina Textor. Au cours des années suivantes il édite par lui-même ses premières œuvres publiées. Au cours d'un voyage à Gotha (petite ville de Thuringe) en 1716, le duc Frédéric II de Saxe-Gotha lui propose une place de chef d'orchestre. Le duc lui promet non seulement de garder son activité de maître de chapelle officiel de la cour d'Eisenach, mais il engage aussi le duc de Saxe-Weimar à lui assurer une éventuelle place de chef d'orchestre. De cette manière Telemann serait devenu en quelque sorte maître de chapelle en chef de toutes les cours de Saxe et de Thuringe.
Une lettre adressée au conseiller de Francfort, dans laquelle Telemann pose un ultimatum (en termes toutefois polis) concernant son salaire, prouve son talent de diplomate. Il reste à Francfort et exige une augmentation de salaire de 100 florins. Ainsi grâce à ses revenus assurés par la "Société Frauenstein" et les honoraires perçus sur ses compositions diverses, Telemann s'assure un salaire annuel de 1600 florins, somme importante pour l'époque, grâce à laquelle il se hisse au rang des personnalités les plus aisées de Francfort.
Pendant un séjour à Dresde en 1719, il rencontre à nouveau Haendel et dédie au violoniste virtuose Johann Georg Pisendel une série de pièces pour violon. Telemann continue parallèlement à écrire des œuvres pour Francfort tous les trois ans jusqu'en 1757, après avoir quitté la ville.
Arrivée à Hambourg
Mais son emploi à vie, il le trouve en 1721 comme directeur des cinq églises principales de Hambourg. Sa célébrité est attestée par la demande que lui fait la ville de Leipzig d'occuper le poste de cantor à l'église et l'école Saint Thomas, emploi auquel il renonce. Ce poste est alors pris par son ami Jean-Sébastien Bach. Un voyage d'études l'emmène en 1737/1738 à Paris.
Son successeur à Hambourg est son filleul Carl Philipp Emanuel Bach.
Telemann a rédigé trois autobiographies en 1718, 1729 et 1740.
Il fut compositeur, mais aussi imprimeur et éditeur de sa propre musique (comme à cette époque Christoph Graupner) et la distribua sous forme d'abonnement. [...]
Hambourg, lieu d'un renouveau
C'est seulement à cette période que les activités de Telemann à Hambourg ont prospéré dans tous les domaines. Il prend la direction de l'Opéra pour un salaire annuel de 300 thalers. Sur les quelque 25 opéras de cette période la majorité ont disparu. En 1723 Telemann reprend également un poste de maître de chapelle à cour du Margrave de Bayreuth, où il fournit de temps en temps de la musique instrumentale et un opéra par an.
1728 Telemann fonde avec Johann Valentin Görner le premier magazine de la musique allemande, contenant des composition des différents musiciens. Le bimensuel Der getreue Musikmeister a pour objectif d'encourager à faire de la musique chez soi. En plus de Telemann et Gorner d'autres musiciens de l'époque ont contribué au magazine grâce à des compositions,comme Keiser, Bonporti et Zelenka.
Voyage à Paris et fin de vie
Invité à Paris par des virtuoses de la ville, il y demeure huit mois en 1737 et 1738. Paris accueille Telemann avec enthousiasme. Ses œuvres sont exécutées en son honneur à la Cour ou au Concert spirituel. À telle enseigne que l'auteur s'aperçoit que l'édition de ses quadri est publiée dans une version de meilleure qualité que l'original, ce qui justifie pour l'auteur un privilège royal de droits d'auteur d'une durée de vingt ans. Une seconde série de quadri est publiée sous le nom de Quatuors Parisiens n° 7 à 12, et exécutée par les meilleures instrumentistes de l'époque. Ces œuvres valent à leur auteur une grande admiration.