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Crumb, Robert (1943-....)

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Biographie

Vie personnelle et débuts professionnels

Né à Philadelphie en 1943 de Charles senior, militaire et Béatrice, femme au foyer, Robert Crumb est le troisième d'une fratrie de cinq enfants. Porté par le frère aîné Charles, Robert et ses frères et sœurs commencent à dessiner des petites histoires et à créer des personnages inspirés par l'univers Disney de Carl Barks.

Il démarre sa carrière professionnelle en 1962 chez {{Lien}} à Cleveland où il réalise des cartes de vœux. En 1964, année de leur rencontre, il épouse Dana Morgan avec qui il a un fils, Jesse, en avril 1968. Débutée en 1963 et inspirée par le conte Jack et le Haricot magique, la bande dessinée Yum Yum Book est écrite en partie comme moyen de séduction et Robert offrira les planches originales à Dana. Arrivé à New York pour travailler avec Harvey Kurtzman, il propose ses premières planches qui sont publiées dans le magazine {{lang}} mais la publication est stoppée. Crumb passe ensuite brièvement chez Topps, un fabricant de chewing-gum et éditeur de cartes à collectionner. La relation avec Dana étant chaotique et influencés par la drogue que prenait le couple dès 1965 (et légale à cette époque), ils se séparent temporairement en avril 1966. Il se rend ensuite à San Francisco en 1967 où Dana le rejoint quelque temps après. Après une longue période sans vivre ensemble, ils finissent par divorcer officiellement en 1977.

Il vit depuis 1990 ou 1991 dans le sud de la France {{refsou}} avec sa femme Aline Kominsky-Crumb rencontrée en 1971 et épousée en janvier 1978{{,}}. Ils travaillent ensemble sur des bandes dessinées à caractère autobiographique, notamment pour The New Yorker. Crumb est parfois engagé politiquement ou économiquement comme lors qu'il contribue à une revue contre l'« agrobusiness » ou contre l'enfouissement des déchets dans son village.

Carrière de dessinateur

Autodidacte, Robert Crumb est très tôt attiré par la bande dessinée. Sous l'influence de son aîné Charles, il dessine énormément et très tôt{{,}}. Avec Charles, il réalise pendant plusieurs années des comics uniquement pour eux avec des personnages animaliers, Donny Dog pour Robert et Fuzzy the Bunny pour Charles, personnage qui sera ensuite repris par Robert. En 1958, toujours avec son frère Charles, il dessine un fanzine nommé Foo qui connait trois numéros et que les deux frères vendent au porte-à-porte sans trop de succès au prix de quinze cents. En 1959 Robert commence à dessiner les aventures du chat de la famille, Fred, qui sera rebaptisé par la suite en Fritz.

Quand le mouvement hippie se développe, il arrive à San Francisco et rencontre de nombreux dessinateurs comme Gilbert Shelton et Spain Rodriguez. Porté par ses premières publications dans la presse locale (Yarrowstalks, The East Village Other), il publie ses dessins dans sa revue Zap Comix en 1968{{,}}, revue vendue à l'époque vingt-cinq cents, dans un contexte très puritain forgé par des valeurs morales protestantes et un secteur de la bande dessinée sous l'égide du Comics Code Authority. Il ouvre les pages de son magazine Zap Comix à d'autres auteurs dessinateurs locaux tels que Rick Griffin, Victor Moscoso et S. Clay Wilson.

En 1968 il réalise Snatch Comics, parodie de bandes dessinées pornographiques des années 1930, dont trois numéros seront publiés et qui soulèveront par leur sexisme une réaction de colère des mouvements féministes et d'une partie de son public féminin dont la dessinatrice Trina Robbins.

La même année à Chicago, il sort Bijou Funnies avec Jay Lynch, SKip Williamson et Jay Kinney. Il rencontre également Art Spiegelman. Ses publications comme ceux d'autres auteurs de la vague underground se vendent dans des magasins spécialisés dans les comics et dans des boutiques type {{Lien}} spécialisées dans les produits de hippie.

En 1969, son histoire Joe Blow traitant d'inceste fait scandale et donne lieu à des descentes de police dans les magasins commercialisant Zap Comix {{n°}}.

Il se met beaucoup en scène dans ses planches, c'est un des pionniers de l'autobiographie en bande dessinée à l'instar de Justin Green qui a également travaillé avec lui sur Zap Comix ; il n'hésite pas à montrer tous ses travers à travers un personnage lâche, obsédé sexuel, infidèle, dépressif ou encore égocentrique. Ses thématiques, très souvent caricaturées, sont d'une grande richesse. Il est tout d'abord le Jean-Jacques Rousseau de la bande dessinée, confessant ses inhibitions, ses fantasmes, ses difficultés relationnelles, ses frustrations, ses aigreurs, bref tout ce qu'il peut y avoir de minable dans la condition d'homme. Son manque de complaisance et son honnêteté sont totales et le font rejeter par un certain public qui trouve l'exposition de certaines réalités ou de certaines fantaisies bien trop obscènes. Il montre par ailleurs son goût pour les femmes très « charpentées » contrastant fortement avec son propre physique de grand mince.

Sa misogynie revendiquée, sa pornographie complaisante et violente envers les femmes lui ont valu les critiques acerbes des artistes féminines de l'underground comme Trina Robbins. Apprenant que Robert Crumb était fait Grand prix de la ville d'Angoulême (en 1999), le scénariste-dessinateur Greg s'est indigné qu'un {{Lang}} qui (pensait-il à tort) ne dessinait plus, ait obtenu une distinction honorifique aussi importante : {{citation bloc}}

Crumb livre par ailleurs un témoignage historique sur la période dite « psychédélique », sur les expérimentations de LSD, sur la libération sexuelle — qu'il n'a pu vivre lui-même qu'une fois devenu célèbre. Il devint malgré lui un des porte-paroles de la contre-culture. Ses héros les plus célèbres sont Fritz le chat (Fritz the Cat), un chat paillard, et Mister Natural, gourou cynique. Il dessine également des pochettes de disques, dont la plus célèbre est Cheap Thrills de Big Brother and the Holding Company avec Janis Joplin en 1968.

Son style est inspiré par celui de ses prédécesseurs allant du graveur William Hogarth à Harvey Kurtzman mais aussi par les dessinateurs classiques de la bande dessinée américaine, tels que E. C. Segar, Rudolph Dirks, George Herriman, Walt Disney et Floyd Gottfredson. De 1962 à 1967, son dessin est caractérisé par un système de hachures dérivé de celui du graveur Thomas Nast. Il passe ensuite jusqu'en 1972 à une période dite big foot en référence aux grands pieds dont il affublait ses personnages et souvent réalisés sous l'emprise du LSD. Après avoir arrêté la drogue, il adopte un style plus posé inspiré des gravures de James Gillray pour ce qui concerne les ombres et volumes.

Son œuvre est parcourue par une grande nostalgie : dans le changement, il ne voit que ce qui se perd et tente par le dessin de témoigner de son pays, du blues des années 1930, des changements vestimentaires, etc.

En 1972, Ralph Bakshi fait une adaptation de Fritz le chat en dessin animé, un des premiers dessins animés pour adulte. C'est Dana, son épouse, qui a signé le contrat autorisant cette adaptation. Crumb a toujours considéré le résultat comme un ratage et ne veut pas y être associé, c'est d'ailleurs après la sortie du dessin animé qu'il décide de faire assassiner son héros Fritz par une autruche, avec un pic à glace.

En 1975, il participe à la revue Arcade avec Art Spiegelman. Crumb gagne un procès relatif à son droit d'auteur notamment pour l'utilisation abusive de ses dessins dont Keep on truckin'... avant qu'une décision judiciaire en 1975 déclare ce même dessin comme faisant partie du domaine public. Cela prive Crumb d'une partie de ses revenus et lui vaut des pénalités concernant ses impôts.

En 1980, il crée la revue Weirdo (littéralement cinglé), qui rassemble des dessinateurs de lunderground et des dessinateurs plus récents. En 1993, il fait paraître Kafka for beginners à partir d'une biographie écrite par David Mairowitz{{,}}. Il ne touche pas un cent pour le dessin animé de Fritz le chat et refuse en 1969 de dessiner une pochette pour les Rolling Stones car il n'aime pas leur musique.

Il s'associe avec Harvey Pekar, un ami rencontré à Cleveland et collectionneur de disques comme lui, illustrant quelques-uns des scénarios de la série American Splendor.

Les premières publications de son travail en France sont dues au quotidien Action, journal soixante-huitard puis dans la revue Actuel dont il fait la couverture du premier numéro sous l'impulsion de Jean-François Bizot.

En 1994, le cinéaste Terry Zwigoff a tourné Crumb, un film documentaire consacré à la carrière de Robert Crumb, à sa vie et à sa famille.

En 2009, il sort une adaptation de la Genèse en bande dessinée, chez Denoël Graphic en France, fruit de quatre années de travail et qui sera vendu à {{Unité}}. Dans le monde, les ventes atteignent les {{Unité}}. Paradoxalement cet auteur rebelle et contestataire à ces débuts est dorénavant considéré comme un « auteur classique » exposé dans les grandes galeries et les musées.

Carrière de musicien

Collectionneur de disques 78 tours, il se passionne particulièrement pour le blues, le jazz, la country et l’{{Lang}}, ainsi que pour le bal musette parisien des années 1920 et 1930, dont il est l'un des plus fins connaisseurs.

Vers 1975, il forme l'orchestre des Cheap Suit Serenaders, jouant dans un style légèrement volontairement désaccordé de chacun des instruments, une amusante et originale petite pointe rétro dans un style typique Cow-boy Western du Texas, teintée d'humour d'une manière s'apparentant à une musique de divertissement, pratiquement unique en son genre, et semblable aux musiques blue-grass / old-time gravées sur les 78 tours des années 1900 à 1930 (mais cette fois enregistrées en qualité haute-fidélité stéréo).

Il enregistrera trois 33 tours de cet ensemble de 6 musiciens, dont plusieurs morceaux sont de sa composition, avec Robert Armstrong (voix, guitare), Bob Brozman (voix, guitare hawaïenne, ukulele), Al (Allan) Dodge (voix, mandoline américaine), Terry Zwigoff (scie musicale, violoncelle, violon fiddle et mandoline) et Tony Marcus (voix, guitare et violon).

Il réalise la pochette de nombreux disques, notamment ceux des Primitifs du futur en 1990, groupe du guitariste Dominique Cravic, qui alterne également avec fantaisie le style typique musette des années 1930 avec le swing jazz manouche, dans lequel il joue occasionnellement du banjo et de la mandoline, et avec qui il enregistrera quatre disques, accompagné également de Daniel Colin à l'accordéon, Daniel Huck au saxophone et Jean-Michel Davis au xylophone (qui dirigera en 2009 l'ensemble "Novelty Fox" orienté sur la musique de genre)

En 2009, il réalise le dessin de couverture et l'habillage graphique du coffret de dix CD France, une anthologie des musiques traditionnelles, produit par Guillaume Veillet et sorti chez Frémeaux & Associés (Grand Prix International du Disque de l’Académie Charles-Cros).