Jaspers, Karl (1883-1969)
Biographie
Né d'un père juriste et d'une mère travaillant dans une coopérative agricole, Jaspers montre un intérêt précoce pour la philosophie, bien que le parcours paternel au sein du système judiciaire l'ait sans doute poussé à étudier le droit lors de son entrée à l'université. Il fut cependant rapidement évident pour lui que le droit n'était pas la bonne voie, ce qui le poussa à entamer des études médicales en 1902. Jaspers obtint son doctorat en médecine en 1909 et commença à travailler dans un hôpital psychiatrique de Heidelberg, où Emil Kraepelin avait lui-même exercé quelques années auparavant. Jaspers ne se satisfit pas de la façon dont la communauté médicale de l'époque approchait la maladie mentale et tâcha d'améliorer cette approche. En 1913, il reçoit un poste temporaire de professeur de psychologie à l'Université de Heidelberg. Ce poste devint rapidement permanent, ce qui lui permit de ne jamais reprendre son activité clinique.
À l'âge de 40 ans, Jaspers se tourne vers la philosophie, explorant les thèmes qu'il avait entamés durant son activité de psychiatre. Il devint un philosophe renommé, respecté et reconnu à travers l'Europe et demeura influent au sein de la communauté philosophique jusqu'à son décès en 1969. Trois événements ont marqué sa vie. La maladie : à 18 ans, il est condamné à mourir avant 30 ans. Son mariage avec une juive, Gertrud Mayer (1879-1974). L'avènement du parti national socialiste ; il sera privé de sa chaire par les nazis. Ces expériences de situation limite et de découverte de l'autre vont profondément influencer sa réflexion philosophique.
Karl Jaspers retourne à l'Université de Heidelberg en 1945, où il prononce une série célèbre de conférences sur la "culpabilité allemande", dans lesquelles il reste assez optimiste quant à la prise de conscience des Allemands de l'atrocité des événements de la Seconde Guerre. Cependant, il se trouve assez isolé au sein de sa propre université, qui devient alors le lieu où plusieurs chercheurs ouvertement nazis non seulement reviennent, mais aussi font tout pour échapper au processus de dénazification (le linguiste Eugen Fehrle, l'historien Johannes Kühn, l'économiste Helmut Meinhold). Déçu par ces événements, il quitte l'Allemagne en 1948, abandonne la nationalité allemande et rejoint l'Université de Bâle.