Scott, Walter (1771-1832)
Contents |
Biographie
Jeunesse
Demeure des Scott, à George Square (Édimbourg), où l'auteur vécut de 4 à 26 ans (entre 1775 et 1797), avant de déménager à Castle Street, dans New Town.
La famille de Walter Scott appartient à une branche cadette du clan Scott, qui est installé dans la région frontière de l'Écosse et dépend de la Maison de Buccleuch. Le père de l'écrivain, Walter Scott (1729-{{date}}) est un bourgeois d'Édimbourg, qui a acheté la charge de « Writer of the Signet » (c'est-à-dire un procureur, pour la France de l'Ancien Régime) en 1755. Sa mère, Anne Rutherford, est la fille aînée de John Rutherford, professeur de médecine à l'université ; elle descend des Haliburton de Newmains, qui disposent du droit héréditaire d'être inhumé dans l'abbaye de Dryburgh. Marié en {{date}}, le couple a douze enfants. Les quatre fils aînés meurent dans l'enfance: Robert, né le {{date}}, John, né le {{date}}, Robert, né le {{date}} et Walter, né le {{date}}. C'est également le cas de deux filles : Anne, née le {{date}}, et Jean, née le {{date}}. Viennent ensuite Robert, né en 1767, qui sert un temps dans la marine avant d'écrire des vers et des histoires d'aventures, et de mourir aux Indes, célibataire ; John, né en 1768, qui deviendra major dans l'armée et mourra à Édimbourg le {{date}} ; Anne, née en 1770, qui mourra le {{date}}, après avoir été infirme toute sa vie ; Thomas, né en 1774, qui sera trésorier payeur d'un régiment de l'armée et mourra au Canada le {{date}} en laissant un fils et deux filles ; Daniel, né en 1775, qui mourra dans le déshonneur à Édimbourg le {{date}}. Septième enfant, Walter, naît le {{date}} à Édimbourg dans les vieux quartiers (College Wynd), assez malsains.
« La Rencontre de Burns et de Scott », peinture à l'huile de Charles Hardie, 1893 (Dunedin Public Art Gallery).
En 1772, alors qu'il est âgé de huit mois, il contracte vraisemblablement la poliomyélite, confondue avec une fièvre liée à une forte poussée dentaire à une époque où cette maladie est encore inconnue de la médecine. Le diagnostic peut être posé de manière rétrospective grâce à la description détaillée que Scott lui-même en a faite. Il gardera comme séquelle définitive une claudication de la jambe droite. Pour le sauver, on l'envoie vivre au grand air chez son grand-père Robert Scott (ancien marin et commerçant de bétail qui a rompu avec les opinions traditionnelles de la famille en devenant, de jacobite, whig et presbytérien) à Sandyknowe, dans le Roxburghshire, où il vit de 1773 à 1775 avec sa grand-mère, sa tante Jenny et une vieille servante, Alison Wilson. Là, il découvre le monde de ses ancêtres, lit son premier poème (une ballade populaire), s'indigne du récit des représailles anglaises de 1745. En 1775-1776, on l'envoie avec sa tante aux eaux de Bath ; au passage, il voit Londres, apprend à lire, son oncle Robert (revenu des Indes) l'emmène au théâtre voir Shakespeare. En 1777, à la mort de son grand-père, il rentre à Édimbourg. De retour à Édimbourg, il fait un nouveau séjour à Sandyknowe, où il visite le champ de bataille de Prestonpans et écoute les récits d'un vieux militaire, Dalgetty (dont le nom apparaîtra dans Une Légende de Montrose). Bien que passionnément jacobite, il souffre des défaites anglaises de la guerre d'Amérique. Chez ses parents, il dévore les livres : les poètes, Shakespeare, les histoires ; sa mère favorise ses goûts littéraires.
La tour Smailholm, près de la ferme de Sandyknowe, où Scott a passé une partie de son enfance.
De 1779 à 1783, après y avoir été préparé par un professeur particulier, il étudie à la Royal High School d'Édimbourg, où il suit pendant deux ans les cours d'un certain Fraser, surtout réputé pour ses coups de fouet, puis d'Alexander Adam, auteur des Antiquités romaines, qui lui donne le goût de l'histoire. Il manifeste des dons remarquables pour le latin. Il lit énormément : Homère, l'Arioste, Boiardo, le Tasse, Ossian (qu'il n'aime pas), Spenser, les Reliques of Ancient poetry de Percy (1765), L'Histoire des chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem de Vertot (1726), Henry Fielding, Samuel Richardson, Tobias Smollett, des romans gothiques, des livres de colportage, des histoires, des récits de voyage. En 1783, il passe quelques mois à la campagne avec sa tante et fréquente l'école de Kelso, où il fait la connaissance de James et John Ballantyne.
Puis, de 1783 à 1786, il étudie le droit à l'université d'Édimbourg. Il a des difficultés avec le grec, suit les cours de Dugald Stewart, s'initie à la logique et à l'histoire. À 13 ans, il entre dans la loge Saint David, la même que celle où son père a été initié en 1755. En {{date}}, son père, qui veut en faire un homme de loi (avocat ou procureur) le prend en apprentissage dans son étude ; Scott déteste cette activité mais se soumet de bon cœur. Une hémorragie interne l'oblige peu après à garder le lit pendant plusieurs semaines. Il continue à lire beaucoup : de l'italien, du français (la bibliothèque bleue, la Bibliothèque des Romans, La Calprenède, Mademoiselle de Scudéry, Joinville, Froissart, Brantôme), de l'espagnol (Cervantes). Quand sa santé s'améliore, avec un de ses compagnons, il commence ses premières excursions historiques autour d'Édimbourg. Il entreprend de copier un recueil de chants populaires, fréquente un collectionneur de vieux livres et de vieux manuscrits, rencontre des hommes de lettres d'Édimbourg (Robert Burns, Adam Ferguson), explore les Highlands avec son père ou des camarades, récolte des anecdotes anciennes ou récentes (sur Rob Roy par exemple) et découvre les sites historiques et pittoresques.
Vue depuis la tour Smailholm, vers l’est et la ferme Sandyknowe.
De 1789 à 1792, il complète ses études de droit à l'université, où il suit un enseignement de philosophie morale dispensé par Dugald Stewart, d'histoire universelle, de droit civil, de droit écossais (avec David Hume, le neveu du philosophe). Cette dernière matière l'enthousiasme ; il est fasciné par ce qu'il regarde comme un élément capital de la culture et de la société traditionnelle de l'Écosse, dont l'édifice juridique bâti au cours des siècles garantit son identité. Il noue des amitiés profondes et durables (W. Clerk, Adam Ferguson, le fils du philosophe), adhère à des clubs où il se fait connaître comme « antiquaire » et érudit, explore à cheval, pendant ses vacances, les régions reculées du Border et le Liddesdale, s'initie à tous les aspects du folklore écossais et à tous les vestiges de son histoire nationale. En 1792, à vingt-deux ans, il soutient (en latin) sa thèse de droit, Comment disposer des cadavres des criminels, puis entre au barreau, comme son père, où ses collègues le surnomment malicieusement « Duns Scott » du nom de John Duns Scot, théologien ecossais de l'époque médiévale, qui écrivait en latin, et devient avocat en 1792. Entre 1793 et 1795, il s'efforce de gagner des procès et d'augmenter des revenus fort bas. En même temps, pendant ses vacances, il poursuit ses voyages d'« antiquaire » et de folkloriste, enregistre des anecdotes sur les hauts faits de Rob Roy, visite le château et le site de Craighall (Tully-Veolan, le château du baron de Bradwardine, dans Waverley), ainsi que le château de Glamis, rencontre Old Mortality, dont il se souviendra dans son roman, recueille des ballades perdues et tente même de faire des fouilles. Par ailleurs, opposé à la Révolution française et proche des idées d'Edmund Burke, il participe au maintien de l'ordre et s'engage dans une milice pour lutter contre les partisans des idéaux révolutionnaires en Grande-Bretagne. La protection du duc de Buccleuch lui permet de devenir adjudant. À cette époque, aussi, il connaît une passion malheureuse pour Williamina Beshes (une jeune fille de cinq ans sa cadette et d'un niveau social nettement plus aisé qui se laisse aimer, avant de s'éprendre d'un autre, William Forbes de Pitsligo, fils d'un banquier avec lequel elle se fiance en {{date}}) ; Scott, qui se sent trahi, en est très affecté.
Poète
Walter Scott, par Sir Edwin Henry Landseer.
À l'âge de 25 ans, il commence à écrire, compose le Chant de guerre du Midlothian (1792), sa première œuvre. Puis, atteint par la vogue de la poésie allemande, il apprend la langue allemande et traduit (anonymement) des poèmes de Bürger, des drames germaniques (comme Götz von Berlichingen de Goethe en 1799) et des adaptations poétiques.
En 1797, pour répondre à des menaces d'invasion française, se forme à Édimbourg le Royal Edimburgh Volunteer Light Dragoons, dans lequel Scott s'engage avec enthousiasme. Au cours d'un voyage dans le Lake District, près de Cumberland, en compagnie de son frère John et d'Adam Ferguson, il fait la connaissance d'une jeune française émigrée, Charlotte Charpentier (rebaptisée Carpenter), pupille du marquis de Downshire. Le {{date}}, il épouse à Carlisle la jeune femme, avec laquelle il aura quatre enfants : Charlotte Sophia (née à Édimbourg le {{date}}), Walter (né à Édimbourg le {{date}}), Anne (née à Édimbourg le {{date}}) et Charles (né à Édimbourg le {{date}}). Le couple s'installe à Édimbourg, George Street, dans le quartier « moderne », comme les parents de Scott, avant de rejoindre North Castle Street en 1798. L'été, il loue un cottage à Lasswade. Scott, lié par convictions et par fidélité à l'establishment tory, en particulier à Henry Dundas (futur lord Melville), au duc de Buccleuch et à son fils, se fait nommer en 1799 shériff (une sorte de juge d'instruction itinérant) du comté de Selkirk. Ses fonctions, qui ne l'empêchent pas de travailler au barreau d'Édimbourg, arrondissent ses revenus.
En 1802, il se fait connaître en publiant trois tomes de ballades écossaises, Les chants de ménestrels de la frontière écossaise, qui regroupent tous les poèmes populaires du sud de l'Écosse qui ont enchanté son enfance, des ballades collectées grâce à un immense travail et des imitations originales de Scott qui travaille sur des manuscrits du Moyen Âge et parcourt le Liddesdale pour écouter des récitants, tout en accomplissant ses devoirs militaires dans le corps des volontaires du Middlothian Yeomenry County. Le livre est publié par James Ballantyne, qui publiait un journal à Kelso et s'installe à Édimbourg. À la même époque, Scott se lie avec le poète populaire Hogg (dit « le berger d'Ettrick ») et avec William Wordsworth.
En 1804, il publie Sir Tristrem, une version (qu'il juge plus pure que les versions continentales) du roman de Tristan dont il a découvert le manuscrit, et qu'il croit de Thomas d'Erceldoune, dit Thomas le Rhymer. Il adapte et achève le manuscrit médiéval. Par ailleurs, à partir de 1803, il collabore à la Revue d'Édimbourg (malgré sa couleur whig), éditée par Archibald Constable et dirigée par Fr. Jeffrey. Pour se rapprocher de Selkirk, il songe d'abord à relever les ruines du château des Scott à Auld Watt, puis loue le domaine d'Ashestiel, qui sera sa demeure d'été pendant de longues années. L'état de ses finances s'améliore avec l'héritage de son oncle Robert Scott.
Abbotsford House.
En 1805, Le Lai du dernier ménestrel connaît un grand succès (15000 exemplaires en 5 ans) et lui apporte la célébrité. Le Premier ministre Pitt l'apprécie hautement. Installé à Ashestiel, entouré de ses chiens, de ses chevaux, servi par Tom Purdie (un ancien braconnier passé devant son tribunal et qui lui sera fidèle toute sa vie), il adopte le style de vie d'un gentilhomme-écrivain, qu'il conservera jusqu'à la fin. Pour garantir ses revenus, et grâce à ses protections politiques, il se fait nommer, en 1806, « Clerk of the Court of Session » (greffier de la Cour Suprême), fonction qui lui demande, six mois par an, cinq à six heures de travail par jour. Mais il n'a pu être nommé que comme successeur d'un titulaire qui continuera à recevoir des émoluments jusqu'à sa mort, et Scott remplira cette fonction sans recevoir de traitement jusqu'en 1812. En 1805, il s'associe avec Ballantyne, qui recherche des capitaux pour développer son imprimerie et reçoit la moitié des deux tiers des bénéfices de la firme Ballantyne, qui va connaître des années de grande prospérité. La même année, en décembre, un quatrième enfant, Charles, voit le jour.
Intérieur d'Abbotsford House.
Entre 1807 et 1810, Scott est à l'apogée de sa gloire comme poète. Il publie Marmion ou la bataille de Flodden Field en 1808, poème narratif dont la stance 17 du chant VI est particulièrement connue ; puis, en 1810, le très populaire La Dame du lac, long poème dont l'intrigue se situe dans les Highlands et qui lui rapporte deux mille guinées ; des passages traduits en allemand deviendront le libretto de lAve Maria de Schubert. Quand il va à Londres, il est fêté comme un prince de la mode. Dans le même temps, au prix d'un immense travail, il édite les classiques anglais (ses éditions de Dryden et de Swift sont des monuments d'érudition). Tory fidèle, il rompt avec la Revue d'Édimbourg (une polémique l'oppose à Jeffrey à propos de Fox et de l'intervention anglaise en Espagne) et entre à la Quarterly Review, fondée en 1809, de couleur tory. De même, il abandonne Constable (trop whig) pour s'entendre avec l'éditeur londonien Murray.
En 1811 paraît La Vision de Rodéric, le dernier roi goth d'Espagne, poème espagnol nourri d'allusions à la politique anglaise et aux victoires en Espagne. La même année, Scott réalise son vœu le plus cher : devenir un laird. Il achète, pour 150 livres, un cottage de quatre pièces, Cartley Hole Farm, sur les bords de la Tweed, entre Kelso et Melrose, qu'il agrandit et qui deviendra Abbotsford. Immédiatement, il commence des projets d'agrandissement, d'embellissement, d'achats de terres et de plantations d'arbres qui vont l'occuper onze ans.
En 1813, il publie anonymement Rokeby et Les Fiançailles de Triermain. La firme Ballantyne and Co connaît une grave alerte financière ; Scott dépense beaucoup et l'imprimerie marche mal. Constable accepte de les aider, mais ce n'est pas suffisant, et Scott doit demander au duc de Buccleuch une garantie de 4000 livres. La même année, il refuse la proposition du Prince-Régent d'être nommé poète lauréat.
Le romancier de l'Écosse
Illustration de Waverley d'après une œuvre de John Pettie (1893).
En 1813, il reprend un roman ébauché en 1805, Waverley, qu'il publie anonymement chez Constable, en {{date}}. L'ouvrage connaît un immense succès. Dans cet ouvrage, Scott décrit les aventures d'un jeune Anglais qui, par amour pour la fille d'un chef de clan écossais, se retrouve mêlé à la révolte jacobite de 1745. Pendant l'été, il fait le tour de l'Écosse par la mer, d'Édimbourg à Greenock, à bord du yacht de Robert Stevenson (le grand-père du romancier), inspecteur des phares. Par ailleurs, il rédige pour lEncyclopædia Britannica (reprise par Constable) trois articles sur la « chevalerie », le « théâtre » et les « romans épiques ou idylliques ». En 1815, Scott publie coup sur coup (sous son nom) un poème, Le Lord des îles, et un deuxième roman (anonymement), Guy Mannering, dont l'histoire se situe vers 1790. Devant l'engouement du public pour les poèmes de Lord Byron, dont l'immense succès de Childe Harold (1812), il abandonne la poésie pour se consacrer essentiellement au roman. Il se rend à Londres, où il a une longue conversation avec Byron, chez l'éditeur John Murray. Il est reçu par le Régent qui l'appelle Walter et porte un toast à « l'auteur de Waverley ». Puis il fait un voyage sur le continent, où il visite le champ de bataille de Waterloo et séjourne à Paris, où il est accueilli par Wellington, lord Castlereagh et le tsar. Il laisse un récit de son voyage dans les Lettres de Paul et dans La Bataille de Waterloo (édité au profit des veuves et des orphelins de la bataille en 1815).
En 1816 paraît L'Antiquaire, le roman préféré de Scott, dont l'intrigue se déroule à la fin du {{s-}}. Mais ses besoins d'argent s'aggravent, pour agrandir Abbotsford, et il veut échapper à la tutelle du seul Constable. Aussi publie-t-il, toujours sous l'anonymat, une nouvelle série de romans chez l'éditeur londonien Murray et son correspondant écossais Blackwood, sous le titre Les Contes de mon hôte, dont la première série comprend Le Nain noir et Old Mortality (qui décrit la répression des Covenantaires sous Charles II en 1679). L'éditeur fictif est un personnage caricatural, Jedediah Cleishbotham, sacristain et maître d'école à Gandercleuch, qui est censé publier le travail d'un certain Peter Pattieson. En {{date}}, Scott publie son dernier long poème, Harold l'Intrépide, puis part, durant l'été, à travers l'Écosse visiter les sites qui seront évoqués dans le roman auquel il travaille, Rob Roy. À Abbotsford, durant l'été, il reçoit la visite de Washington Irving, qui laissera un long récit de ce séjour.
Château d'Abbotsford.
En 1817 paraît Rob Roy, avec la mention « par l'auteur de Waverley ». Dans ce roman, il évoque la figure historique de Rob Roy et la révolte jacobite de 1715. Jouant de la rivalité qui oppose ses éditeurs, Scott consent à donner à Constable la seconde série des Contes de mon hôte, à condition qu'il reprenne tout le stock invendu de Ballantyne. Cette seconde série comprend Le Cœur du Midlothian (1818), dont l'histoire s'ouvre sur l'émeute Porteous, qui eut lieu à Édimbourg en 1736, et décrit le périple d'une fille du peuple, Jeanie Deans, pour sauver sa sœur, accusée d'infanticide. La même année, il assiste avec émotion à la redécouverte des Regalia d'Écosse, insignes de la royauté écossais qui avaient disparu depuis cent ans. Bien qu'il blâme sa prédilection pour les horreurs (moquées par Edgar Allan Poe), Scott collabore au Blackwood's Magazine, rival de lEdinburgh Review.
À cette époque, il atteint un niveau exceptionnel de popularité et de fortune (au moins {{unité}} de revenu annuel) en Europe. En 1819, paraît la troisième série des Contes de mon hôte chez Constable, La Fiancée de Lammermoor, un roman noir à la manière de Roméo et Juliette évoquant l'amour de deux jeunes gens appartenant à des familles ennemies, dans l'Écosse vers 1669, et Une légende de Montrose (qui décrit l'Écosse et les Highlands sous Charles {{Ier}}, pendant la guerre civile). Souffrant de plus en plus de sa jambe et de calculs biliaires, sous l'effet de fortes doses de laudanum, Scott dicte à John Ballantyne et à William Laidlaw ses romans dans une sorte de transe. Quand son état de santé s'améliore, il affirme à Ballantyne en découvrir les épisodes en même temps que les lecteurs, tant l'opium a troublé sa mémoire. La même année, il reçoit le titre de baronnet et obtient une commission d'officier pour son fils aîné, Walter, qui sera cornette chez les hussards.
Le roman historique
Walter Scott. Gravure parue dans le volume 5 de Bibliothek des allgemeinen und praktischen Wissens (1905).
Le {{date}}, jour de la mort de sa mère, Scott, qui jusque-là décrivait le passé récent de l'Écosse, fait paraître son premier vrai roman historique avec l'évocation de l'Angleterre du {{XIIe siècle}} dans Ivanhoé. En moins de deux semaines, le premier tirage de 10000 exemplaires est épuisé. Suivent Le Monastère et L'Abbé (sur Marie Stuart) en 1820, puis Kenilworth (qui raconte l'histoire d'Élisabeth et Amy Robsart) et Le Pirate (qui prend pour toile de fond la vie dans les Shetland à la fin du {{s-}}) en 1821. En 1820, il fait un séjour à Londres pour recevoir du nouveau roi George IV son titre de baronnet (le 30 mars). Il se fait faire un portrait par Thomas Lawrence et un buste par Chantrey. Sa fille Sophia se marie, le 29 avril, avec John Gibson Lockhart, un jeune écrivain tory, ami de la famille depuis plusieurs années, qui sera le biographe de Scott. John Ballantyne publie une collection de romanciers ; Scott se charge d'écrire un essai sur chacun d'entre eux ; il commence par une Vie de Fielding, puis celle de Smollett.
En 1822, Scott publie un roman, Les Aventures de Nigel, et deux poèmes historiques : The Halidon Hill et Mac Duff's Cross. La même année George IV fait une visite officielle en Écosse (il est le premier roi d'Angleterre à poser le pied sur le sol écossais depuis le {{XVIIe siècle}}). Scott organise les manifestations de bienvenue à Édimbourg : il fait figurer les clans, retrouve leur antique ordre de préséance, discipline les rivalités. Revêtu d'un tartan (dont il relance la mode) aux couleurs des Campbell, il accompagne partout le roi (qui a revêtu un kilt). Le roi le fait féliciter par Robert Peel. Scott en profite pour réclamer la restauration des pairies écossaises (supprimées après les insurrections jacobites) et le retour à Édimbourg du canon géant Mons Meg (saisi par les Anglais en 1746).
En 1823, il publie Peveril du Pic, roman inspiré de la rumeur de complot papiste qui avait agité l'Angleterre au {{s-}}. Puis c'est au tour de la France du {{XVe siècle}} et de la lutte entre Louis XI et Charles le Téméraire d'être décrites, à travers l'histoire d'un garde écossais, dans Quentin Durward. En revanche, c'est dans le passé récent de l'Écosse qu'il puise le sujet de Redgauntlet, paru en 1824, qui décrit l'écrasement définitif des conspirations en faveur des Stuart en 1767. De même, l'intrigue des Eaux de Saint-Ronan, pour une fois, se situe au {{XIXe siècle}}. Le {{date}}, Scott marie son fils, maintenant capitaine, à Jane Jobson de Lochore, fille de William Jobson, un marchand prospère, et nièce de sir Adam Ferguson, qui l'a instituée son héritière, et lui donne la propriété d'Abbostford (contre une rente annuelle à verser). Il commence une nouvelle série de romans : les Histoires du temps des croisades, dont les deux récits, Les Fiancés et Le Talisman, paraissent la même année. Par ailleurs, Constable crée une collection de livres à bon marché (les Constable's Miscellaneous) paraissant tous les mois : le premier sera La Vie de Napoléon de Scott.
Les dernières années
Monument en hommage à Sir Walter Scott à Édimbourg.
Toutefois, tandis qu'il rassemble sa documentation, en vue de ce travail, les associés londoniens de Constable connaissent des difficultés financières. Ses deux éditeurs, Constable et Ballantyne, tombent à leur tour, entraînant Scott dans leur ruine. En {{date}}, il se retrouve avec {{unité}} de dettes. Refusant de faire banqueroute, tout autant que l'idée, lancée par certains de ses admirateurs, d'une souscription nationale, il réussit à sauver ses biens, mais engage sa plume, se fait assurer sur la vie au profit de ses créanciers, vend aux enchères sa maison de Castle Street, à Édimbourg, hypothèque les meubles et le domaine d'Abbotsford, congédie la plupart de ses domestiques et renonce à tout autre revenu que ses fonctions. Il écrit un roman sur Cromwell et le futur Charles II à la fin de la Première Révolution anglaise, Woodstock (vendu pour 8000 livres à Longman), puis reprend La Vie de Napoléon. En même temps, il publie un pamphlet, les Lettres de Malachi Malagrowther, pour défendre les banques écossaises, menacées de perdre le droit de faire circuler leurs propres billets. La polémique lui vaut plusieurs inimitiés politiques, mais le gouvernement recule. Le {{date}}, son épouse meurt.
En octobre, il part à Paris en compagnie de sa fille Anne pour faire un voyage d'études, qui doit compléter les nombreux documents mis à sa disposition par le gouvernement britannique, en vue de sa Vie de Napoléon. Il est unanimement fêté. En 1820, la traduction du roman Ivanhoé avait créé un engouement extraordinaire, qui avait lancé la mode des romans historiques, et un accord avait été passé entre son éditeur de Londres et celui de la rue de Saint-Germain-des-prés (permettant à chacun de ses livres de paraître simultanément à Londres et à Paris, avec la traduction d'Auguste-Jean-Baptiste Defauconpret). Lors de son séjour, on joue Ivanhoé, sur une musique de Rossini, à l'Opéra, Louis XI à Péronne (adapté de Quentin Durward) au Théâtre français, Leicester de Scribe et Auger (tiré du Château de Kenilworth) et La Dame blanche (une adaptation inspirée à la fois du Monastère et de Guy Mannering) à l'opéra-comique. Il est même reçu par le roi Charles X.
Le palais de Holyrood d'Édimbourg.
En 1827, pour la première fois, Scott reconnaît, au cours d'un dîner et en réponse à un toast, qu'il est le « Grand Inconnu ». Au début de l'été paraît en neuf volumes La Vie de Napoléon, qui crée une polémique avec le général Gourgaud (qui manque de finir en duel), la première série des Chroniques de la Canongate, un recueil de Mélanges et rembourse plus de 35000 livres.
En 1828, il continue à produire abondamment, publie la suite des Chroniques (le roman La Jolie Fille de Perth, qui se situe en Écosse à la fin du {{XIVe siècle}}), commence à faire paraître les Contes d'un grand-père (une histoire de l'Écosse dédiée à son petit-fils John Hugh Lockhart), dont la publication se poursuit jusqu'en 1831. En outre, il entreprend, chez l'éditeur Cadell, une réédition complète de ses romans, les Waverley Novels (édition dont Scott parle comme étant son Magnum Opus ; il rédige une Préface générale (où il expose les raisons et les modalités pratiques de ses années d'anonymat) qui paraîtra en 1829 et reprend tous ses romans, qu'il enrichit méthodiquement de notes.
En 1829, son second fils engage une carrière dans la diplomatie. Assisté de sa fille Anne, il publie Anne de Geierstein, qui est un succès commercial, écrit un drame, La Tragédie Ayrshire, tiré d'un fait divers du {{XVIIe siècle}}, une autre pièce, La Maison d'Aspen, et entame son Histoire d'Écosse. Cette même année, en réponse à un courrier enthousiaste de sir Thomas Dick Lauder, il affirme son scepticisme au sujet des allégations des frères Allen, qui prétendent posséder un manuscrit ancien attribuant des dessins de tartans spécifiques aux différents clans écossais. Cela n'empêchera pas les deux frères de publier en 1842 leur fameux Vestiarium Scoticum, qui, ironie de l'histoire, contribuera à la tradition désormais répandue d'attribuer un tartan à un clan. Toutefois, le travail l'épuise, et sa santé se dégrade ; il souffre notamment de crises de rhumatisme aiguës et de problèmes de vue. Le {{date}}, il a une grave attaque d'apoplexie, dont il se remet. Une seconde crise intervient en novembre. La même année, il publie la quatrième série des Contes d'un grand-père et ses Lettres sur la démonologie et la sorcellerie. Mais, affaibli, il doit résilier sa charge de « Clerk of the Court of Session ». Il refuse les propositions de postes ou de sinécures du ministère (whig). Il lui reste 60000 livres de dettes.
Scott Monument à Édimbourg.
Après la révolution de 1830, il organise la réception à Édimbourg de Charles X, qui s'est réfugié au palais de Holyrood, demeure de ses ancêtres Stuart. En novembre, il est victime d'une nouvelle attaque, d'autant que l'agitation politique pour la réforme électorale lui crée de vives inquiétudes. Profondément conservateur, proche des tories, il tente de s'opposer à ce projet de loi (qui sera adopté en 1832), qui vise à modifier le découpage électoral (inchangé depuis l'époque des Tudor), à mieux représenter les grandes villes et à faire disparaître les bourgs pourris, et multiplie les meetings. La réforme adoptée, il est persuadé que la Révolution française va traverser la Manche et détruire les dernières traditions du Royaume-Uni. Malgré son prestige, il est violemment conspué lors d'une réunion électorale à Jedburgh.
Obsédé par ces craintes, surmené par le travail, affaibli par la maladie, il craint, par ailleurs, de perdre son génie. Son nouveau roman, Robert, comte de Paris, avance difficilement, et il doit le réécrire. Il subit une nouvelle attaque en {{date}}. Pour son dernier roman, Le Château périlleux, qui se situe dans le château de Douglas, il fait un ultime voyage à travers l'Écosse. Dans cet ouvrage, il évoque la figure du barde et devin Thomas le Rhymer et de son poème Sir Tristrem, qu'il avait édité en 1804.
Mais sa santé réclame un climat chaud. Le gouvernement met une frégate à sa disposition, et, en octobre, il part en compagnie de son gendre Lockhart pour Malte et l'Italie. Pendant le voyage, à la demande expresse de son gendre, il rédige partiellement un nouveau roman, Le Siège de Malte. Débarqué à Naples le {{date}}, deux mois après son départ de Portsmouth, il visite Rome (où il s'incline devant le tombeau du dernier des Stuart), puis se repose quelque temps à Tivoli et à Frascati. Pour rentrer en Angleterre, il décide de descendre le Rhin. Néanmoins, en {{date}}, il est frappé par une nouvelle crise et débarque à Nimègue, dans un état grave. Quand il arrive à Londres, il est presque inconscient et presque muet et ne s'anime qu'en entendant parler d'Abbotsford et de l'Écosse. Ramené en bateau à Abbotsford, il meurt de paralysie le {{date}}. Il est enterré le 26 dans les ruines de l'abbaye de Dryburgh, où repose déjà son épouse Charlotte.
À sa mort, il devait encore 54000 livres. Ses héritiers négocient avec Cadell la cession de ses droits d'auteur, pour lesquels l'éditeur verse 33000 livres.