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Cavanna, François (1923-2014)

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Biographie

La famille Cavanna

François Cavanna grandit à Nogent-sur-Marne (Val-de-Marne) dans la petite communauté italienne immigrée. "Une enfance merveilleuse", à laquelle il consacrera en 1978 son grand roman, Les Ritals. Son père, Luigi (1880-1954), était venu de Bettola, village du val de Nure (province de Plaisance en Émilie-Romagne). Sa mère, Marguerite, née Charvin (1890-1976), est originaire du village de Sauvigny-les-Bois dans la Nièvre. Luigi Cavanna travaille comme maçon, la plupart du temps pour l’entreprise Taravella et Cavanna. À la suite des menaces de renvoi en Italie pendant les années 1930, il demande la naturalisation qu’il obtient le 25 octobre 1939. François Cavanna est leur fils unique.

Les études

Durant son enfance, il fait preuve d’un goût exceptionnel pour la lecture et réussit très bien à l’école, malgré une attitude très dissipée. Il passe le certificat d’études primaires à 12 ans, suit les cours de l’école primaire supérieure (EPS) de Nogent-sur-Marne et obtient le brevet en 1939. Mais il n’a pas envie de poursuivre des études et entre à la Poste en septembre 1939.

Le début de la Seconde Guerre mondiale

Affecté comme « manipulant auxiliaire » dans un bureau de poste parisien, Cavanna reçoit, en juin 1940, comme les autres employés, l'ordre de partir pour Bordeaux. Il quitte Paris à vélo au milieu des colonnes de réfugiés de l'exode et, par Melun, Fontainebleau et Nemours, atteint Gien où il voit pour la première fois des soldats allemands. Un peu plus loin, près de Saint-Amand-Montrond, il est bloqué par un poste de contrôle allemand et est obligé de rentrer à Paris.

Il perd son emploi à la Poste (compressions de personnel) ; il est d'abord commis d'un marchand de fruits et légumes, puis travaille dans plusieurs entreprises du bâtiment. Fin 1942, il est recruté comme maçon par le service d'entretien d'une firme nogentaise, mais presque aussitôt se trouve requis pour le STO (début 1943).

Le service du travail obligatoire

Après un assez éprouvant voyage en train, son groupe de requis arrive dans la banlieue sud-est de Berlin, au camp de Baumschulenweg, dans le district de Treptow (actuellement : Köpenick-Treptow). Ils sont affectés à l’entreprise de munitions {{Lien}}. François Cavanna, ne parvenant pas à obtenir le rendement exigé pour la production d’obus, se retrouve très vite dans un commando disciplinaire chargé du déblaiement des gravats après les bombardements alliés. À l’usine Graetz, conduisant sa machine, il est assisté par deux requises soviétiques, dont Maria Tatartchenko avec laquelle il va rester lié pendant les deux années suivantes.

Début 1945, à l’approche de l’armée soviétique, les requis de Baumschulenweg sont transférés près de Stettin pour creuser des tranchées antichars. Le 4 avril, l’ordre de repli est donné ; François Cavanna et Maria quittent la colonne des réfugiés et entrent en contact avec l’armée soviétique dans un village du Mecklembourg. Il est alors séparé de Maria, dont il perd la trace ; pendant un mois et demi, il essaie de la retrouver, puis renonce. Il est amené de Schwerin à Lübeck, en zone américaine, et rapatrié fin mai 1945.

L’après-guerre

Il reprend d'abord son emploi d’avant le STO, puis est employé par l’Association des déportés du travail, fournissant aussi une bande dessinée au journal Le Déporté du travail. De nouveau victime d'une réduction de personnel, il se lance pour une première période comme dessinateur à plein temps, en particulier pour un journal pour enfants, Kim (série Micou et son chien Tomate). Il reprend un travail salarié en 1948-1949, puis redevient dessinateur de presse, activité dont il parvient à tirer un revenu qu'il juge convenable. Il adopte alors le pseudonyme de Sépia, qu'il utilise jusque dans les années 1960.

De Zéro à Charlie-Hebdo

En janvier 1954, il devient collaborateur d’une publication toute nouvelle, le magazine Zéro, créé par Jean Novi, dont il va devenir rédacteur en chef. Il s'agit d'un « journal de colportage » : parmi les colporteurs apparaît bientôt un ex-engagé en Indochine, Georges Bernier, que son efficacité comme vendeur mène au rang de directeur des ventes. Cavanna abandonne l'activité de dessinateur pour se consacrer à l'écriture, tout en se formant aux aspects techniques du journalisme (mise en page…). Mais il se sent à l'étroit sous la direction de Jean Novi, qui impose des limites au contenu du magazine, d'ailleurs rebaptisé Cordées, nom jugé moins provocant que Zéro.

Après la mort de Jean Novi (en 1959 ou 1960), Cavanna s'associe avec Georges Bernier (qui prend alors le nom de « professeur Choron ») et quelques autres pour fonder en 1960 le magazine Hara-Kiri (mensuel), puis en 1969 Hara-Kiri Hebdo et le mensuel de bandes dessinées Charlie. Après l'interdiction de Hara-Kiri Hebdo à la suite de sa une sur la mort du général de Gaulle (« Bal tragique à Colombey - un mort »), le journal est relancé sous le titre de Charlie Hebdo.

En mai 1968, François Cavanna est brièvement hospitalisé pour une crise hémorroïdaire. Il ne peut donc pas, à son grand regret, participer aux événements. Cet épisode est raconté avec humour dans son ouvrage Les Yeux plus grands que le ventre.

Au début des années 1970, un épisode important de l'histoire de Charlie Hebdo est le départ de Delfeil de Ton. Cavanna et lui se brouillent gravement. L'un comme l'autre, ainsi que leur ami Gébé, ont laissé ce qu'il fallait comme clés pour que l'on puisse comprendre à demi-mot pourquoi : il s'agit clairement d'une affaire non pas politique, ni littéraire, mais personnelle. Cavanna se montre navré de la décision de DDT de quitter Charlie Hebdo, ce qui affecte quelque temps sa production littéraire dans l'hebdomadaire. Il le défend contre des attaques de Jacques Martin, insiste sur le fait que « Delfeil a sa place ici à Charlie Hebdo et peut revenir quand il le voudra », peine perdue : la rupture est consommée.

Charlie Hebdo cesse de paraître à la fin 1981, victime d'une perte de lecteurs et d'une mauvaise gestion financière. Cavanna collabore ensuite à nouveau avec Choron de 1986 à 1988, à l'occasion d'une nouvelle version de Zéro.

En juin 1986, sa petite-fille Marie meurt d'une overdose à l'âge de 18 ans. Il passe alors de la tolérance à la dénonciation de la drogue : {{citation}}

En 1992, Cavanna rejoint la nouvelle formule de Charlie Hebdo, relancé par Philippe Val, Cabu et Wolinski. Il y signe des chroniques et figure à nouveau dans l'ours à la fonction d'« ange tutélaire ». Choron, furieux de ne pas être associé à la direction de cette nouvelle version, refuse le poste de chroniqueur que lui proposait Cavanna, ce qui entraîne une brouille définitive entre les deux anciens compères. Choron intente ensuite une action en justice en revendiquant la paternité du titre du journal, et relance par ailleurs une éphémère nouvelle version dHara-Kiri. Il est finalement débouté, plusieurs membres de l'équipe étant venus témoigner que Cavanna était l'auteur du titre Charlie Hebdo.

En 2000, Choron participe à une nouvelle relance dHara-Kiri en association avec André Bercoff : Cavanna intente alors un procès pour s'opposer à la sortie de ce journal, dont il conteste à la fois la teneur et le fait que Bernard Tapie ait été annoncé comme collaborateur. En 2002, Cavanna obtient définitivement gain de cause et, après celle de Charlie Hebdo, se voit reconnaître la propriété du titre Hara-Kiri.

Fin de vie

En janvier 2011, le site web BibliObs publie les bonnes feuilles du dernier ouvrage de François Cavanna, Lune de miel (Gallimard). Dans ce livre, l'auteur révèle être atteint de la maladie de Parkinson, qu'il qualifie de « salope infâme ».

Hospitalisé pour une intervention due à une fracture du fémur et victime de complications pulmonaires, François Cavanna meurt le mercredi 29 janvier 2014 à l'hôpital Henri-Mondor de Créteil. Après l'incinération au Père-Lachaise le 6 février, ses cendres sont inhumées le lendemain au cimetière de Chaumes-en-Brie (Seine-et-Marne), la ville ou plus précisément le hameau de Forest où il habitait depuis une quarantaine d'années.