Aller au contenu principal

Trollope, Anthony (1815-1882)

Biographie

Le père d'Anthony Trollope, Thomas Anthony Trollope, est barrister (avocat plaidant). Thomas Trollope, homme pourtant intelligent et ayant reçu une excellente éducation, en particulier au New College d'Oxford, ne réussit pas au barreau, sans doute en raison de son caractère colérique. De plus, il monte une entreprise agricole qui lui fait perdre de l'argent, et l'héritage qu'il attend d'un vieil oncle lui échappe quand, contre toute attente, ce monsieur se marie et a des enfants. Néanmoins, il vient de la bonne société et est lié à l'aristocratie des propriétaires terriens (gentry). À ce titre, il tient à ce que ses fils soient éduqués en « gentlemen » et fréquentent l'université d'Oxford ou l'université de Cambridge. Le contraste existant entre l'extraction sociale de la famille et sa pauvreté est une source de souffrance pour le jeune Anthony, qui ne peut, par manque d'argent, accéder aux occupations et aux divertissements auxquels il aspire.

Né à Londres, Anthony étudie à la Public School de Harrow, Harrow School, en qualité d'externe pendant trois ans à partir de sa septième année, établissement choisi pour son excellence et aussi sa proximité, la ferme paternelle se trouvant dans le voisinage. Après quelque temps passé dans une autre école privée, il suit son père et deux de ses grands frères à Winchester, Winchester College, où il reste trois ans. Il retourne ensuite à Harrow en qualité d'externe afin de réduire les frais de scolarité. Trollope est plutôt malheureux dans ces deux prestigieux établissements, où il souffre de la brutalité des anciens et de ses pairs, de son manque d'argent chronique et aussi, les deux étant sans doute liés, de la solitude car il ne peut s'y faire aucun ami. Il se réfugie dans le monde de l'imagination et construit des univers complexes qui sont vraisemblablement à l'origine de sa vocation littéraire.

En 1827, sa mère, Frances Trollope, déménage aux États-Unis avec trois des frères d'Anthony ; elle ouvre un bazar à Cincinnati, qui fait faillite. Thomas Trollope les rejoint brièvement avant de retourner à la ferme de Harrow, mais Anthony, lui, reste en Angleterre. Sa mère revient en 1831 et se fait rapidement un nom en tant qu'écrivain, ce qui lui donne une réelle aisance financière. L'affaire du père périclite rapidement au point que ce dernier doit, en 1834, s'enfuir précipitamment pour la Belgique afin d'éviter la prison pour dettes. La famille tout entière emménage dans une maison près de Bruges, où elle vit grâce à l'argent que Frances gagne avec ses livres. En 1835, Thomas Trollope meurt.

Alors qu'il vit en Belgique, Anthony travaille comme professeur assistant dans une école, où il suit des cours de français et d'allemand en vue d'obtenir un poste d'officier dans un régiment de cavalerie autrichien, poste qu'il occupe pendant six semaines. Puis il est recruté comme fonctionnaire des Postes de Sa Majesté, grâce à l'entremise d'une relation de sa mère. Il retourne donc à Londres où il vit seul, ses nouvelles fonctions lui apportant la respectabilité qu'il recherche mais des revenus très modestes.

En Irlande

Trollope vit dans diverses pensions de famille, restant à l'écart de toute vie sociale ; il qualifiera plus tard cette période comme ayant été son "hobbledehoyhood", jeu de mots qu'on pourrait traduire par « sa période grand dadais », référence, sans doute, à sa gaucherie physique naturelle et aussi à sa précarité sociale. Professionnellement, en effet, il ne progresse guère, mais tout change en 1841 lorsque l'administration des Postes le nomme en Irlande. En 1844, il épouse une Anglaise, Rose Heseltine, avec laquelle il s'installe dans ce pays où ils vivent jusqu'en 1859. Sur son séjour, alors qu'il a connu au plus près la désastreuse famine qui a décimé la population, Trollope ne fait, dans son Autobiographie (Autobiography), qu'un commentaire plutôt laconique :

Somme toute, ce fut une vie très agréable que je menais en Irlande. Les Irlandais ne m'ont ni tué ni fracassé la tête. Je les ai trouvés agréables de caractère et intelligents - le peuple y est beaucoup plus intelligent qu'en Angleterre -, et en plus, ils sont économes et hospitaliers.

Son travail d'Inspecteur des Postes lui fait rencontrer beaucoup d'Irlandais. Trollope se met à écrire lors des longs trajets en train qu'il doit effectuer pour son travail et qui le mènent d'un bout à l'autre de l'Irlande. Dès le départ, il s'est fixé des règles très strictes concernant le nombre de pages à écrire chaque matin, rattrapant le lendemain ce qu'il n'a pas accompli la veille. Cette discipline, à laquelle il ne faillit jamais, lui permet de devenir l'un des écrivains les plus prolifiques de tous les temps. Ses premiers romans sont inspirés par la boite dite des « lettres mortes » (dead letters), dans laquelle il pioche lorsqu'il en éprouve le besoin. Là se trouvent les lettres non-distribuées pour cause de décès ou d'adresse incorrecte. Beaucoup de ses premiers romans ont l'Irlande pour cadre, ce qui, pour d'évidentes raisons politiques, lui vaut un accueil plutôt distant et réservé de la part de la critique.

Retour en Angleterre

Boîte aux lettres

Au milieu des années 1860, Trollope est élevé à un grade important dans la hiérarchie des Postes. L'histoire de cette administration lui attribue l'introduction de la {{Lien}}, l'omniprésente boîte à lettres rouge qu'on trouvait partout au Royaume-Uni. C'est l'époque où ses romans commencent à lui rapporter des sommes importantes. De plus, il a plus ou moins surmonté sa gaucherie naturelle, bien qu'il se décrit toujours (cf. son Autobiographie) comme de grande taille, plutôt massif et lourd. Dès lors, Trollope fréquentent les cercles où ils rencontrent certains grands noms de la littérature. De plus, Il dispose des moyens lui permettant de s'adonner à sa passion pour les chevaux et, en particulier, pour la chasse à courre (fox hunting).

Il quitte l'Administration des Postes en 1867 pour faire campagne sous l'égide du Parti Libéral lors des élections générales de 1868, (Parlement parti libéral). Comme il n'est pas élu député (MP [Member of Parliament]) de sa circonscription, il consacre le reste de sa vie à sa carrière littéraire. Les romans se succèdent rapidement et plusieurs sont publiés en feuilletons (instalments) dans le St Paul's Magazine dont il est devenu l'éditeur.

Son premier grand succès est The Warden (1855), petit chef-d'œuvre dont l'action se déroule dans le comté fictif du "Barsetshire". Ce roman, qui a pour héros malheureux un membre du bas clergé, est suivi de nombreux autres exploitant la même veine. Cette série constitue ce qu'on appelle les Chroniques du Barsetshire. La satire comique de Barchester Towers (1857) vaut peut-être à ce roman de figurer parmi les plus populaires de Trollope.

L'autre série majeure, les {{Lien}}, traitent de sujets politiques, avec, comme protagonistes principaux, le riche aristocrate {{Lien}} et sa femme Lady Glencora, délicieusement spontanée et encore plus riche que lui. Tout au long des deux séries, les protagonistes reviennent sur la scène, entourés de certains personnages déjà rencontrés et aussi de nombreux autres qui y commencent une carrière fictive, parfois poursuivie et parfois interrompue selon les besoins de l'intrigue.

La popularité de Trollope et son succès critique pâlissent dans les dernières années de sa vie, mais il continue d'écrire avec la même verve. Son œuvre satirique Quelle époque ! (The Way We Live Now, 1875) est considérée comme son chef-d'œuvre http://www.liberation.fr/livres/0101628984-trollope-pour-etre-honnete. En tout, Trollope a écrit quarante-sept romans, ainsi que des douzaines de nouvelles et quelques livres de voyage.

Anthony Trollope meurt à Londres en 1882. Il est inhumé au Kensal Green Cemetery, près de son contemporain Wilkie Collins.