Duhamel, Georges (1884-1966)
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Biographie
Jeunesse et études
Georges Duhamel naît au {{numéro}} rue Coypel près de la place d'Italie dans le {{13e}} arrondissement de Paris. Il est le troisième d’une famille de quatre enfants — originaire de Septeuil en Île-de-France du côté paternel{{,}} et de Normandie du côté maternel — qui vit chichement des activités d’un père, Pierre-Émile Duhamel (1849-1928), « fantasque et inconstant{{,}} », et d'une mère, Marie Emma Pionnier (1854-1939), tous deux herboristes. « Pharmacien », son père décide d'entreprendre, passé quarante ans, des études de médecine. Après une enfance perturbée par les nombreux déménagements de sa famille (plus d'une dizaine d'adresses à Paris, puis au Havre, Nevers, et enfin à Montreuil-sous-Bois{{,}}), Georges Duhamel fait ses études au lycée Buffon à Paris, puis au lycée de Nevers, et enfin à l'Institution Roger-Momenheim. Il obtient son baccalauréat en 1902 et décide alors de devenir médecin tout en s’adonnant aux lettres.
L'abbaye de Créteil et la Première Guerre mondiale
Les membres de l'abbaye de Créteil en 1906. Georges Duhamel est le deuxième en partant de la gauche. Entre 1906 et 1908, il crée avec son ami le poète Charles Vildrac, qui deviendra son beau-frère, « l’abbaye de Créteil » ou groupe de l'Abbaye, phalanstère d’artistes regroupant poètes, écrivains, musiciens et peintres, expérience qu’il a relatée de façon romancée, bien qu’il s’en soit défendu, dans le cinquième volume de la série de la Chronique des Pasquier, le Désert de Bièvres. À l'occasion de représentations théâtrales à l'Abbaye de Créteil, il fait la rencontre et s'éprend de l'actrice Blanche Albane avec laquelle il entretient une importante correspondance. Il l'épouse le 2 décembre 1909 à Paris et aura avec elle trois fils : Bernard (1917-1996, futur chirurgien-pédiatre), Jean (1919-1998, futur médecin proctologue infantile) et Antoine Duhamel (1925-2014, futur compositeur de musique). De 1910 à 1914, frais diplômé en médecine et en chimie biologique, il travaille sur les propriétés des métaux à l'état colloïdal pour les laboratoires pharmaceutiques Clin à Paris.
Durant la Première Guerre mondiale, il décide de s'engager dans le service actif alors qu'il avait auparavant bénéficié d'une réforme médicale en raison de sa vue. Il veut faire don de lui-même et partager les épreuves des hommes de sa génération. À partir de 1914, Georges Duhamel occupe pendant quatre ans les fonctions de médecin aide-major dans des unités d'auto-chirurgie, dans des situations souvent très exposées notamment lors de la bataille de Verdun. Alors qu'il exerce près du front de Champagne en 1915, il décide de raconter les épreuves que les blessés subissent. Deux romans naîtront de cette expérience : d'une part Vie des martyrs, paru en 1917, un recueil de récits qui connaîtra un certain succès. La presse compare ce livre au roman d'Henri Barbusse, Le Feu, prix Goncourt en 1916. D'autre part, Georges Duhamel entreprend la rédaction de Civilisation, livre-témoignage sur les ravages de la guerre. Le livre sort en {{date}} sous le pseudonyme de Denis Thévenin car Duhamel ne veut pas être accusé de profiter de la guerre pour faire de la littérature et reçoit le {{date}} le prix Goncourt. Enfin, Georges Duhamel donne, le 13 janvier 1920 à la maison des Amis du livre sur invitation d'Adrienne Monnier, une importante conférence sur le thème Guerre et littérature dans laquelle il invente, selon Antoine Compagnon, la notion de « littérature de témoignage » et s'inquiète du désintérêt littéraire rapide concernant la Grande Guerre pouvant conduire à « une amnésie historique [...] et à un risque de dénaturation du sens de l'Histoire » au profit d'une « littérature de convention » — analyse qui sera reprise deux ans plus tard par Maurice Genevoix dans l'avant-propos des Éparges.
Reconnaissance et cycles littéraires
Rendu à la vie civile, il se consacre désormais entièrement aux lettres et à la défense d’une civilisation à visage humain. En 1919, il découvre en Seine-et-Oise la vallée du Sausseron et Valmondois, où il passera tous ses étés. Il écrit alors en 1920, Confession de minuit, qui deviendra le premier tome de son premier cycle romanesque Vie et aventures de Salavin (1920-1932), considéré par de nombreux critiques littéraires comme précurseur des questions existentialistes que développeront plus de quinze ans plus tard Camus dans La Chute (1956) et Sartre dans La Nausée{{,}} (1938).
C’est au début des années 1930 qu’il entame sa Chronique des Pasquier qui le rendra célèbre, selon le principe du roman-fleuve, œuvre qui est parfois comparée aux Rougon-Macquart d'Émile Zola ou aux contemporains Thibault de Roger Martin du Gard. La publication de ce cycle littéraire au Mercure de France s'étend de 1933 à 1945. Elle peut être vue comme la transposition littéraire autobiographique de la vie de Georges Duhamel dans son héros principal Laurent Pasquier. En 1935, Georges Duhamel devient directeur du Mercure de France et la même année est élu le 21 novembre, à sa seconde tentative, à l’Académie française au fauteuil {{numéro}}30 à la suite du décès de G. Lenotre ; sa réception officielle au sein de l'Illustre Compagnie a lieu le {{date}} avec un discours d'accueil prononcé par Henry Bordeaux. En 1937, il est également élu à l'Académie de médecine. Avec François Mauriac, qui en est le fer de lance, il s'oppose nettement mais en vain à l'élection en juin 1938 de Charles Maurras à l'Académie française.
Entre 1930 et 1940, il accomplit de nombreux voyages en France et à l’étranger, défendant par de brillantes conférences la langue et la culture françaises ainsi que l’idée d’une civilisation construite sur le cœur de l’homme et non uniquement sur les progrès techniques de la mécanisation envers lesquels il est le plus souvent critique, le classant comme un écrivain de gauche{{,}}. Articles et conférences sont rassemblés sous divers titres, et la période de l'entre-deux-guerres constitue celle de son plus grand succès auprès du public. Il devient alors membre du jury du Prix Jeunesse, dont il prendra plus tard la présidence, en 1945.
Années sombres de la guerre et fonctions d'après-guerre
Pendant la Seconde Guerre mondiale, Georges Duhamel, voit dès 1940 une partie de son œuvre interdite par les Allemands{{,}} qui mettent sur la liste Bernhard des ouvrages interdits par la Gestapo trois de ses livres. Quelques mois plus tard, c'est l'ensemble de son œuvre qui est inscrite sur la liste Otto, se voyant de plus interdit de toute publication en 1942. Durant toute cette période sombre, durant laquelle il reste volontairement à Paris et ne fait que quelques séjours dans sa maison de campagne de l'Oise, il tient tête ouvertement à la pression de l'occupant et à la fraction pétainiste de l’Académie française{{,}}{{,}}{{,}} — notamment en décembre 1940 lorsque, allié à Paul Valéry, il empêche le vote d'une lettre de soutien au maréchal après l'entrevue de Montoire —, institution au sein de laquelle il est durant cette période volontairement très présent et actif à « visage découvert{{,}} ». Il explique cette attitude dans une lettre à son ami François Mauriac indiquant : {{citation bloc}} À cette fin et à la suite de la mort d'André Bellesort, Georges Duhamel se fait élire le {{date}} comme secrétaire perpétuel de l'Académie à titre provisoire pour « tenir en respect les forces maléfiques »{{,}}. Avec Mauriac, Gillet et Valéry, ils vont être « pratiquement maîtres de l'Académie » et s'attachent en 1942 à ne remettre les prix de l'institution qu'à des écrivains engagés secrètement dans la résistance ou réputés proches{{,}}{{,}}. En conséquence, il est l'objet de virulentes attaques dans Je suis partout durant cette période.
Son positionnement et ses engagements durant la période du gouvernement de Vichy sont reconnus à la Libération de Paris par le général de Gaulle qui le rencontre lors d'un déjeuner le {{date}} à Paris et reconnaitra publiquement son action dans ses Mémoires de guerre (Le Salut, 1959) dans lesquels il qualifie Duhamel de « secrétaire perpétuel, illustre et courageux »{{,}}. Il l'aide alors dans sa démarche d'après-guerre pour conforter l'Académie dans son rôle malgré les vives attaques qu'elle subit. En octobre 1944, Georges Duhamel est élu cette fois-ci définitivement secrétaire perpétuel de l'Académie, pour mener à bien ce renouveau, mais il démissionne de son poste dès 1946 en raison de ce qu'il considère comme un basculement du centre de gravité politique de la compagnie vers la droite dont il ne se sent pas le représentant.
Georges Duhamel est également nommé au Comité national des écrivains en 1944 mais en démissionne également en 1946 pour protester contre les excès de l'Épuration. Après la guerre, il est nommé, en 1947, président de l’Alliance française et reprend ses voyages en faveur de la culture française. Il rétablit partout de nombreuses écoles de l’Alliance. En 1950, son roman Confession de minuit (1920) fait partie de la liste du Grand prix des Meilleurs romans du demi-siècle regroupant une sélection de douze romans publiés entre 1900 et 1950. Il fut membre du Comité d'honneur de l'Association du foyer de l’abbaye de Royaumont et du Centre culturel international de Royaumont.
À partir de 1960, la santé de Georges Duhamel décline, l'obligeant à réduire beaucoup ses activités. Il meurt à Valmondois le {{date}}.